Manifestation contre la réforme des retraites : 2400 personnes devant la gare d’Albertville, 800 sur la 2x2

Après avoir défilé avenue des Chasseurs-Alpins, les manifestants se sont dirigés vers la 2x2 voies. 800 personnes y ont bloqué la circulation pendant une vingtaine de minutes.
Après avoir défilé avenue des Chasseurs-Alpins, les manifestants se sont dirigés vers la 2x2 voies. 800 personnes y ont bloqué la circulation pendant une vingtaine de minutes.

«   La retraite, elle est à nous ! On s’est battus pour la gagner, on se battra pour la garder », crient les manifestants devant la gare. Selon les syndicats, ils sont plus de 3000 à avoir bravé le froid ce jeudi 19 janvier, et environ 2400 selon la police.

Les participants sont unanimes : à Albertville, ça fait longtemps qu’on n’a pas vu une telle mobilisation. « Aujourd’hui, il y a quand même énormément de monde qui a l’air de prendre conscience de ce qui se passe, se réjouit François-Xavier, 73 ans. Reporter l’âge de départ à 64 ans, c’est infernal. On parle d’un déficit du système des retraites : quand on voit tout ce qui est gagné par 1 % des personnes les plus riches, 2 % d’imposition sur ces revenus-là permettraient de combler ce déficit. Il n’y a qu’à regarder le dernier rapport de l’Oxfam. »

Les syndicats aussi s’enthousiasment du nombre de manifestants : « C’était important d’être très nombreux dans la rue pour montrer qu’on est contre cette réforme », déclare Bérangère Rey, secrétaire générale de l’union locale de la CGT d’Albertville. Pour elle, l’argument de l’équilibre des budgets du système des retraites ne fonctionne pas : « On a plein d’alternatives pour cela. » Anthony Gros, de la CGT métallurgie Savoie, confirme : « Le conseil d’orientation des retraites a prouvé que cette réforme n’était pas nécessaire. Il y a plein d’autres possibilités aujourd’hui pour ne pas s’attaquer au système des retraites, on peut s’attaquer à la fraude fiscale, qui fait perdre chaque année 100 milliards d’euros, on a la flat tax... »

Après avoir défilé dans le centre-ville, la manifestation se dirige dans l’autre sens. 800 manifestants bloquent la RN90 pendant une vingtaine de minutes, avant de revenir vers la gare.

« On se démène toute notre vie pour arriver à la retraite »

Au milieu du cortège, certains manifestent pour la première fois : c’est le cas de Gérard, permanent en station de ski. À 55 ans, il explique qu’il est présent au sujet de la réforme des retraites, mais aussi pour exprimer un ras-le-bol général : « On tape toujours sur la classe moyenne. On se démène toute notre vie pour arriver à la retraite, et puis en y arrivant, on nous dit «  non non, ça va reculer parce qu’on manque d’argent», alors qu’a priori ce serait totalement faux ! » Au-delà de sa propre retraite, le quinquagénaire s’inquiète pour les générations futures.

Grelottant au milieu des manifestants, Kelly, 33 ans, craint de futures réformes : « J’ai commencé à bosser tard, donc j’allais partir tard de toute façon, mais là encore plus tard. Si on commence maintenant avec des réformes comme ça, je me dis que quand j’arriverai à la retraite, ce sera peut-être 70 ans ! »

Un peu plus loin, un couple suit le cortège en se tenant la main. « On aimerait avoir une retraite à un âge raisonnable, je pense qu’on a suffisamment travaillé toute notre vie pour en profiter », explique Mme Arnoux. « Moi je suis à un an de la retraite, on va me rajouter un trimestre supplémentaire. Ce n’est pas énorme, mais comme j’aurai ma retraite avant mon épouse, au lieu de rester quatre ans seul à la retraite, je vais rester cinq ans et demi seul à la retraite », renchérit son mari.

« Pour les retraités et pour les générations futures »

Saisonnier en station, Nico explique que le calcul de son propre départ à la retraite est très compliqué à mener : « J’ai été intermittent du spectacle, autoentrepreneur, j’ai bossé à l’Éducation Nationale... Donc mon départ est hyper reculé. J’y perds, mais je suis là aussi pour ceux qui sont à la retraite et qui risquent de perdre ce qu’ils ont, pour ceux qui vont rentrer à la retraite pour qui on a repoussé le départ, et pour les générations futures qui risquent de ne pas en avoir du tout. »

En congé aujourd’hui de son travail à l’unité de soins longue durée du CHAM à Moûtiers, Mélanie est venue soutenir ses collègues en grève : « Je suis solidaire avec mes collègues. J’étais en repos aujourd’hui, donc j’ai décidé de descendre parce que 64 ans, c’est trop tard, il faut qu’on vive un petit peu. Je ne me vois pas être aussi vieille que mes patients et travailler, c’est juste pas possible ! »

Les prochaines échéances

30 janvier : début de l’examen du texte par la commission des affaires sociales à l’Assemblée Nationale

31 janvier : deuxième journée de mobilisation intersyndicale

6 février : début des débats en séance publique à l’Assemblée

17 février : fin prévue des débats à l’Assemblée pour ensuite examiner le texte au Sénat

Équilibrer le système des retraites ?

Pierre-Louis Bras, président du COR.

Le texte de réforme du système de retraites prévoit de repousser l’âge légal de départ de 62 à 64 ans à partir de 2030. De plus, selon ce texte, il faudra avoir cotisé 43 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein à partir de 2027. Le gouvernement souhaite également mettre fin aux régimes spéciaux de retraite pour les nouveaux embauchés à partir de 2023.

Selon le conseil d’orientation des retraites (COR), avant la réforme, « de 2032 jusqu’à 2070, malgré le vieillissement progressif de la population française, la part de dépenses de retraite dans la richesse nationale serait stable ou en diminution ». Le COR explique également que le système serait déficitaire « sur les 25 prochaines années ».