Créée en 1978 par Michel Etevenon, La Route du Rhum-Destination Guadeloupe relie Saint-Malo, en Bretagne, à Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, tous les 4 ans. Elle regroupe, sur la même ligne de départ, le plus grand plateau de la voile océanique, avec des grandes figures de la voile, des professionnels et amateurs.
Initialement prévu dimanche 6 novembre, le départ de la transatlantique a été reporté en raison des conditions météorologiques. A l’heure où nous écrivons ces lignes, il devait être donné, ce mercredi 9 novembre, à 14 h 15, dans des conditions plus clémentes. D’une distance totale de 3 542 milles, soit 6 562 kilomètres, la course compte, cette année, 138 solitaires, répartis entre six catégories de bateaux. Francis Joyon, vainqueur de l’édition 2018, détient le record de l’épreuve, après 7 jours 14 heures 21 minutes et 47 secondes en mer.
Isabelle Joschke, qui a passé toute son adolescence dans le Pays de Gex et dont la maman réside toujours dans notre région, navigue à bord de son IMOCA MACSF (monocoque de 60 pieds, 18,30 mètres de long), parmi 37 marins engagés dans cette catégorie (elles sont 4 femmes en IMOCA).
Peu de femmes dans la course au large
Elles ne seront que 7 femmes engagées sur l’épreuve, une de plus qu’en 2018. Trois ont déjà gagné la course : Florence Arthaud, en 1990, sur son navire Pierre 1er ; Ellen Mc Arthur à bord de Kingfisher, en 2002, dans la catégorie IMOCA et Anne Caseneuve, en 2014, dans la catégorie des Rhum multi. « De la même manière que peu de femmes ont des postes à responsabilité dans la société, il n’y a pas beaucoup de femmes dans la voile, confiait Isabelle à France 3 régions, le 26 octobre dernier. Ce qui veut dire peu de possibilités d’identification chez les jeunes. Pour la course au large, celles qui sont présentes sont celles qui, soit ont un caractère fort, soit ont reçu une éducation pour oser. Toutes les femmes doivent se sentir le droit d’essayer. »
« Objectif de l’année »
Pour sa deuxième participation à la Route du Rhum, la skippeuse annonce viser un top quinze. « Même pour rentrer dans la première moitié de tableau, le combat s’annonce acharné, précisait-elle lors d’un entretien accordé à Voile et Moteur, le 4 novembre dernier. Je vise une confrontation directe avec les IMOCA de 2015/2016. C’est un peu la deuxième division mais peu importe, quand je suis sur l’eau, la motivation est là et je donne tout pour finir devant. » Après un convoyage tranquille depuis Lorient La Base, son monocoque est amarré dans le port de Saint-Malo depuis le 26 octobre dernier. « Avant le départ, j’ai un programme chargé que j’essaie d’alléger au maximum, précise-t-elle, dans un communiqué. Ma priorité est de me mettre dans ma bulle et de rester dans ma course, focalisée sur cette échéance qui est mon objectif de l’année. »
– Née le 27 janvier 1977, Isabelle a la double nationalité française et allemande.
– Titulaire d’une maîtrise en lettres classiques à la Sorbonne, rien ne la prédestinait à devenir navigatrice.
– « Après ma maîtrise, j’ai décidé de changer de cap et de faire de la voile mon métier. J’ai passé deux brevets, l’un pour devenir éducateur sportif et l’autre skipper. J’ai travaillé comme skipper, dans le monde de la plaisance, pendant deux ans, avant de me lancer dans l’aventure de la Mini Transat et d’acheter mon premier bateau, en 2003, un mini, d’une longueur de 6,50 mètres. »
– En 2021, la skipper est contrainte à l’abandon sur le Vendée Globe, seule course à la voile autour du monde, en solitaire, sans escale et sans assistance. Elle rejoindra tout de même les Sables d’Olonne, hors course, à bord de son navire IMOCA MACSF, après 108 jours de mer.
« Sur l’eau, je ressens un sentiment de liberté, en connexion permanente avec les éléments »
Isabelle Joschke est née en Allemagne, à Munich, où ses parents ne sont pas restés longtemps. « Je suis arrivée dans le Pays de Gex, à l’âge de 11 ans, nous racontait la skippeuse, au cours d’un entretien, en 2020. Ma mère a enseigné l’allemand, à Gex, puis au lycée de Ferney. Elle réside toujours dans la région. Mon père était informaticien à Genève. J’ai étudié au collège de la cité scolaire internationale de Ferney-Voltaire. Mon père étant de nationalité allemande, j’ai suivi des cours dans une classe bilingue, effectué ma seconde à Ferney, avant de poursuivre mes études en Allemagne, à Fribourg, dans un lycée franco-allemand. Je suis ensuite revenue en France pour suivre des études de lettres, à Lyon, puis obtenir une maîtrise en lettres classiques, à la Sorbonne. »
Son premier déclic pour la voile a lieu lors de vacances familiales sur les lacs d’Autriche, à bord d’un Optimist. Elle est alors âgée de 5 ans. « J’étais en admiration devant les bateaux qui naviguaient devant moi. Une passion qui s’est confirmée, 15 ans plus tard, lors d’un stage aux Glénans, durant lequel j’ai eu un véritable coup de foudre. Je garde en mémoire la houle de l’océan, le crachin breton, le fait d’être immergée dans les éléments et de m’y sentir bien, vivante, libre. Sur l’eau, je ressens un sentiment de liberté, en connexion permanente avec les éléments. Je coupe complètement avec la vie terrienne. Durant mon année de licence, j’ai embarqué sur un voilier pour faire une transat jusqu’au Brésil. Après ma licence, j’ai pris une année de césure pour apprendre à manier un bateau et naviguer. C’était vraiment un rêve, qui a mis du temps à se réaliser. »