Sept ans après l’incendie qui l’a ravagé, le Bernascon renaît de ses cendres. Pendant ces années, des habitants ont vécu dans les travaux de reconstruction du bâtiment. D’autres, dont les appartements ont été sinistrés, ont dû vivre loin de chez eux. Aujourd’hui, à part l’aile nord qui est encore en travaux (lire ci-contre), l’heure est plutôt aux finitions. « La marquise au-dessus de la porte d’entrée a été posée il y a quelques semaines », nous montre Jean Feaz, le président du conseil syndical.
Ces années ont été marquées par des chantiers d’ampleur. À commencer par le déblayage lié au feu. Dès octobre 2015, les travaux de sécurisation et de dépollution du bâtiment se sont mis en place pendant sept mois. Les habitants de l’aile non sinistrée n’ont pu réintégrer leurs logements qu’en mai 2016. Un mois plus tard, les copropriétaires n’ont pas voulu s’apitoyer sur leur sort. « On ne voulait pas se laisser abattre. On a décidé de finir la toiture et le ravalement de façade, débutés juste avant l’incendie, sur la partie qui n’avait pas brûlé. On a mis deux ans à tout refaire. »
Retour au style du XIXe siècle
Place ensuite à la partie sinistrée. Le vrai gros œuvre se trouve là, et il n’a pu débuter qu’en mars 2018. « On a eu beaucoup d’imprévus ou de travaux supplémentaires : la présence d’amiante, de plomb, de la mérule, puis le Covid, ajoute Jean Feaz. Cela n’a pas été un long fleuve tranquille. » Tout a été refait. Le toit a été reconstruit avec une charpente traditionnelle « identique à ce qui existait », avec des ardoises véritables.
« Tous les planchers ont été remplacés, ainsi que toutes les fenêtres et les portes. On a aussi remis aux normes les réseaux électriques, de plomberie et la VMC… Les assurances ont joué le jeu. Comme la procédure judiciaire est encore en cours, ils auraient pu attendre et ne rien payer jusqu’à maintenant, mais ça n’a pas été le cas. » En septembre 2021, les habitants de la partie sinistrée ont pu regagner leurs logements et se prêter aux aménagements privés. Beaucoup, traumatisés par l’incendie, ont cependant décidé de ne plus revenir et de vendre.
Des travaux anticipés
Quitte à faire des travaux, les copropriétaires en ont profité pour refaire les rampes du jardin, « qui s’écroulaient », et l’ascenseur historique qui était en panne. « Tout cela n’a pas été indemnisé car cela n’avait pas de rapport avec l’incendie. » Un nouvel appel de fonds a permis de commencer un chantier de remise à niveau de tous les communs de l’aile droite, qui n’a pas été touchée par l’incendie. Le système de distribution d’eau a été refait, des faux plafonds coupe-feu ont été posés, une issue de secours en bout de bâtiment a été installée, et des petits travaux d’embellissement ont été menés pour redonner son style au Bernascon. « C’était un moment prenant, mais tellement enrichissant quand on a du résultat. On est tellement content que ça rattrape toutes les peines, confie Jean Feaz. On est tous attachés à ce bâtiment, on voulait en conserver l’esprit. Quand on arrive au Bernascon, on tombe sous le charme. »
Si quelques travaux restent à faire, notamment installer des grilles devant l’entrée pour « faire sortir l’hôtel de la rue et de la circulation », le Bernascon a déjà retrouvé une nouvelle jeunesse. Et il va la garder pour un moment. « En 10 ans, on a pris 40 ans d’avance sur les futurs travaux. On a eu le sinistre, autant en tirer le meilleur. »
Le Bernascon est aujourd’hui une propriété privée. Il est donc interdit d’y entrer si l’on est de passage devant le bâtiment.
Par contre, les espaces communs sont ouverts à la visite lors des Journées européennes du patrimoine (chaque année en septembre) et il est aussi possible de participer toute l’année à des visites de groupes organisées par les guides conférenciers du service Ville d’art et d’histoire et par l’Office de tourisme Aix Riviera des Alpes.
Plus d’informations sur www.aixlesbains-rivieradesalpes.com.
1897-1900 : construction du Bernascon, à la demande de Jean-Marie Bernascon, hôtelier aixois d’origine lyonnaise
1914-1918 : l’hôtel est réquisitionné pour servir d’hôpital militaire
1943 : il est de nouveau réquisitionné, cette fois par l’armée allemande, pour servir d’hôpital
1944-1947 : de nombreux travaux de remise en état ont lieu avant la réouverture
1956 : fermeture définitive de l’hôtel, la société qui l’exploitait ne retrouvant pas l’équilibre financier
1960 : le Bernascon est vendu en copropriété
17 août 2015 : un incendie ravage une bonne moitié du bâtiment
Le 17 août 2015, tout bascule dans le bâtiment du Bernascon, ancien hôtel de la Belle époque reconverti en logements en copropriété. En pleine nuit, un incendie démarre en haut du bâtiment et ravage la toiture et plusieurs étages, dont l’ensemble du promontoire. À peine un mois auparavant, un grand chantier de réfection de la toiture et de la façade venait de commencer. « La toiture était en bout de course, pleine de fuites, et les ardoises comtenaient de l’amiante, explique Jean Féaz, président du conseil syndical du Bernascon. On avait donc engagé ces travaux à 1,5 million d’euros. »
96 personnes évacuées
Mais cette nuit-là, l’ampleur des choses va changer. L’incendie ne fait heureusement aucun blessé, mais le bâtiment, lui, est en très mauvais état. Une bonne partie du corps central est détruite et, avec elle, tous les appartements qui s’y trouvaient. 96 personnes, propriétaires ou locataires dans cette partie de l’immeuble, ont donc entamé au moins six ans loin de leur habitation et ont été relogées par la Ville, puis par leurs assurances ou leurs proches.
Les habitants ont pu petit à petit réintégrer leurs logements, au fil des travaux de rénovation. Mais un mystère demeure toujours : la cause exacte de l’incendie. Sept ans après, « une enquête judiciaire est encore en cours, précise Jean Féaz. Cette histoire n’est pas prête d’être réglée… » Elle aura en tout cas marqué le centre aixois pendant un bon moment.