À Paris, les lignes de métro sont bondées en heures de pointe. Mais ce n’est rien à côté de la foule qui se presse au Salon de l’agriculture.
Après un an d’absence due au Covid, « la plus grande ferme de France » fait son retour et les agriculteurs des Pays de Savoie sont comme toujours au rendez-vous. Et comme les masques ne sont plus obligatoires, il y a un côté libérateur. « Ça libère la parole ! Les gens sont très intéressés », indique Véronique Nicoud, du Syndicat de défense du Beaufort. Cette nouvelle édition du salon n’aurait pas pu mieux porter son nom : l’édition des retrouvailles. C’est cela, surtout, qui a manqué aux producteurs des deux Savoie. « L’année dernière, on n’a pas pu retrouver les copains et les copines, admet Maurice Petit-Roulet, ancien président du syndicat de l’Emmental et en plein atelier dégustation. C’est un moment très important pour les agriculteurs, il y a ce côté convivial. »
« On vient pour entretenir une notoriété »
Tous nous affirment que l’absence de salon en 2021 n’a « pas eu d’impact économique ». « Ce n’est pas ici qu’ils vont faire beaucoup de chiffre d’affaires, précise Grégoire Turpin, animateur de la Fédération Divagri, qui promeut la diversité agricole. Le souci, c’est surtout un déficit d’image. C’est aussi à Paris que des choses peuvent peut-être se faire en termes de subventions. »
Pas très loin de Neige, la vache du Grand-Bornand égérie du Salon de l’agriculture 2022, d’autres vaches abondance se prélassent devant les visiteurs. Delphine Challamel, éleveuse à la ferme Challamel-Fillion à Domancy, recherche aussi cette visibilité en venant au salon. « On n’est pas ressortis depuis deux ans pour des concours, alors c’est un vrai plaisir de revenir et de se retrouver. »
En plus de montrer leurs vaches, les éleveurs peuvent en effet glaner des prix qui « récompensent l’élevage et mettent en valeur la race », explique Ludovic Pellicier, du Gaec le Consortage à Granier, dont la vache tarentaise a obtenu le premier prix de section et celui de meilleure mamelle adulte. « On vient aux salons grand public surtout pour entretenir une notoriété, ajoute Alexis Martinod, le directeur des Vins de Savoie. Cela permet de découvrir ou redécouvrir un produit local. Même les Savoyards ne connaissent pas ou ont un a priori sur les vins de Savoie ! ».
Malgré tout, si ce n’est pas au Salon que les producteurs font leur plus gros chiffre d’affaires, l’événement permet des retombées futures. Marie-Louise Donzel, présidente de la filière Reblochon, affirme que « des gens qui ont dégusté un bon reblochon cherchent à racheter. C’est donc hyper important. On valorise le travail des producteurs. »
Du côté du stand de vente, Jean-Luc Duclos, président de l’Association des fromages traditionnels des Alpes, admet que certains vendeurs ont dû être mis au chômage faute de salon l’an passé. « Mais dans un salon normal, on vend entre 800 et 1 000 kg de fromages par jour, et là on atteint déjà les ventes effectuées en 2019. » Alors tous en profitent et veulent surtout que ce salon 2022 soit « une belle fête pour les gens, pour les agriculteurs… et pour Neige ! »
Cédric Laboret: «La fermeture des stations a sûrement été plus préjudiciable»
Le président de la chambre d’agriculture Savoie Mont-Blanc, Cédric Laboret, partage la joie des éleveurs et producteurs de voir le grand retour du Salon de l’agriculture à Paris, après une annulation l’an passé due à la crise sanitaire.
Dans quel état d’esprit êtes-vous pour le retour du Salon de l’agriculture ?
« Je suis très positif ! Je pense que l’agriculture a besoin de communiquer, de parler de ce qu’elle fait et de ses valeurs. C’est un métier vu par tous, mais connu par peu, et nous devons expliquer ce que l’on fait. Le Salon de l’agriculture est un moment parfait pour cela puisque les gens peuvent rencontrer les agriculteurs.
L’absence de salon l’an passé a-elle eu un impact sur ces professionnels ?
Je ne pense pas qu’il y ait eu un impact majeur. Pour les deux Savoie, la fermeture des stations a sûrement été plus préjudiciable en comparaison. Avec le Covid, on a eu plus de gens directement dans les fermes et un plus grand intérêt pour le monde agricole. Il faut s’en saisir et faire passer les bons messages.
Pourquoi l’événement est-il toujours si important dans ce cas ?
Car il y a des échanges. Les gens ne sont pas là que pour faire connaître leurs propres exploitations mais pour l’agriculture de façon globale. Les éleveurs rencontrent d’autres éleveurs du territoire ou de France. C’est un moment de reconnaissance qui doit être important pour se rappeler du rôle essentiel de l’agriculture et communiquer avec fierté sur ce que font les agriculteurs. On aimerait que tout cela soit plus partagé et reconnu. »